Sa mission est
d’analyser les risques climatiques et environnementaux à moyen et long terme,
en lien avec la sécurité nationale et la résilience de la Belgique.
L’analyse des
risques climatiques pour la Belgique (BCRA) publiée le 6 novembre 2025 porte
sur l’impact potentiel de ces risques sur les secteurs et systèmes critiques.
Le risque est ici
considéré, conformément à la définition du GIEC comme le résultat des
interactions entre les aléas (augmentation des températures, vagues de chaleur,
modification des régimes de précipitations, …), l'exposition (éléments
susceptibles d’être exposés aux aléas comme les personnes, les biens ou encore
les écosystèmes) et la vulnérabilité (influencée par la sensibilité du système
concerné et sa capacité d’adaptation).
Source : GIEC, 2014
Importance
des enjeux sociaux
Le rapport pointe,
s’il était encore nécessaire de le rappeler, les personnes à faibles revenus
sont les plus exposées du fait de leurs caractéristiques et de leurs conditions
de vie.
Les personnes
âgées, les enfants, les populations urbaines, les personnes en situation de
handicap, les migrant·e·s, les travailleur·euse·s de la santé et en extérieur,
ainsi que les personnes sans-abri ou vivant dans des logements précaires sont
particulièrement vulnérables.
D’une manière
générale, les populations à faibles revenus sont touchées de manière
disproportionnée par presque tous les risques auxquels elles n’ont pas les
moyens de s’adapter.
Par exemple, les
quartiers défavorisés sont souvent des îlots de chaleur par manque de
végétalisation, se situent plus fréquemment en zones inondables, présentent une
forte densité de population et des logements de moindre qualité, exposant ainsi
davantage leurs habitant·e·s à la chaleur, aux inondations, à la pollution ou à
la propagation de maladies.
Et si des mesures
suffisantes ne sont pas prises pour protéger les plus vulnérables, des risques de
dislocation sociale (déplacements internes, augmentation des inégalités,
pression sur les systèmes sociaux) allant jusqu’à compromettre la sécurité
nationale sont présents.
Il ressort ainsi clairement
du travail réalisé que les enjeux sociaux en lien avec l’adaptation au changement
climatique et à la destruction de la biodiversité sont fondamentaux. Il ne
s’agit pas, loin de là, d’un aspect des politiques climatiques et
d’environnement qu’il faudra bien prendre en considération par le biais de
quelques mesures de soutien additionnelles mais d’un défi central.
On peut juste
regretter que cette prise de conscience de l’urgence soit motivée par des
questions sécuritaires, davantage que par des motivations éthiques et de
justice sociale.
Nous y
sommes !
Le changement
climatique n’est plus un danger lointain mais un risque existentiel pour la
survie de nos sociétés telles que nous les connaissons.
Au niveau de
l’Europe, l’anomalie de température sur la période 2019-2023 a atteint 2,2°C
par rapport à la période préindustrielle provoquant des phénomènes climatiques
extrêmes (vagues de chaleur, sècheresses, précipitations) de plus en plus
fréquents et une dégradation sans précédent des écosystèmes, formant ensemble une
boucle de renforcement mutuel.
L’analyse des
risques climatiques pour la Belgique identifie 28 risques prioritaires répartis
en cinq secteurs/systèmes : les écosystèmes, l’alimentation, les
infrastructures et les bâtiments, la santé humaine et le bien-être de la
population, ainsi que l’économie et la finance.
Cette analyse vise
à recenser les risques les plus importants liés au changement climatique et à
la dégradation des écosystèmes, évaluer leur urgence et l’état actuel de
préparation politique et définit des recommandations.
Ecosystèmes
Les forêts, les
sols, ainsi que les écosystèmes d’eau douce et côtiers terrestres sont de plus
en plus menacés, principalement par la sécheresse, la chaleur, les feux de
végétation et l'élévation du niveau des mers.
Alimentation
Les systèmes
alimentaires de la Belgique doivent faire face à la baisse des rendements
agricoles, à la disparition des pollinisateurs, à la dégradation des sols, aux
maladies du bétail et aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement. Par
exemple, la sécheresse de 2018 a fait chuter les rendements de pommes de terre
de près de 30 %.
Infrastructures
et bâtiments
Les inondations, la
sécheresse, la chaleur et les espèces envahissantes menacent les
infrastructures et les bâtiments en Belgique.
Santé humaine et
bien-être de la population
Les vagues de
chaleur meurtrières, les nouvelles maladies à transmission vectorielle et les
zoonoses, les maladies dues à l'augmentation du rayonnement UV, à la pollution
atmosphérique et au pollen, la détérioration de la santé mentale et
l'interaction des risques intensifieront la pression sur des systèmes de santé
déjà fortement sollicités. Par exemple, durant la vague de chaleur de l'été
2025, environ deux tiers des décès en Europe, liés à la chaleur, étaient
directement attribuables au changement climatique.
Economie et
finance
L'augmentation de
l'intensité et de la fréquence des catastrophes d'origine climatique, en
particulier des inondations, met sous pression le système d'assurance belge
ainsi que les finances publiques.
L'état de préparation
politique varie selon le secteur considéré. En comparaison à de nombreuses
autres politiques visant à une bonne préparation de la Belgique, la
planification de la protection contre les inondations en est à un stade plus
avancé, bien qu'encore insuffisante au regard de l'ampleur attendue des risques
climatiques futurs.
La protection des
écosystèmes face au changement climatique, la sécurité alimentaire, l’état de
préparation des politiques de santé publique et l'intégration des risques
financiers présentent des lacunes majeures qui les rendent peu aptes à faire
face à l’intensification des pressions climatiques.
Par ailleurs, le
millefeuille institutionnel notamment, le décalage entre les cycles politiques et
budgétaires de court terme et les exigences de long terme des politiques
d’adaptation, la réflexion politique en silos entravent la mise en œuvre
d’actions efficaces face à des enjeux qui réclament une action systémique et
coordonnée.
Face à ces
constats, les plans climatiques de nos gouvernements manquent cruellement
d’ambition.
A la fois au niveau
belge et au niveau européen, la tendance est même au détricotage d’un certain
nombre de législations.
La "directive
Omnibus", sous prétexte de simplification administrative, adoptée par le
Parlement européen le 13 novembre 2025, affaiblit plusieurs textes
responsabilisant les entreprises par rapport à l’impact environnemental et
social de leurs activités comme la CSRD (Directive
sur la publication d'informations en matière de durabilité des entreprises) et
la CSDDD (Directive sur le devoir de vigilance des
entreprises).
Quant au PNEC (Plan
National Energie Climat) actualisé qui vient d’être transmis à la Commission
avec plus d’un an de retard, il conditionne clairement l’adoption des mesures
climatiques à la compétitivité des entreprises et à la croissance économique.
Or même le GIEC,
dans son 6ème rapport, reconnaît que même un découplage absolu entre
l’augmentation du PIB et les émissions de gaz à effet de serre ne permettrait
pas de limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C ou 2°C.
Investir dans la
transition énergétique et la protection des écosystèmes, dans les transports
publics, dans la formation et la création d’emplois durables, anticiper la
reconversion des industries fossiles serait pourtant économiquement rationnel
afin d’éviter un coût de l’inaction qui serait clairement catastrophique sur
tous les plans et en particulier sur le plan social.
Plus d’informations :
Changement
climatique : la Belgique n’est pas prête - La cohésion sociale et la sécurité
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