Les auteurs mettent
en évidence une déconnexion importante entre les conclusions des travaux de
prospective en la matière et les réalités de terrain au niveau de la formation
et de l’enseignement.
Aujourd’hui, en
effet, les administrations en charge de l’emploi et de la formation se limitent
à répondre aux besoins à court terme des employeurs, de sorte à combler les
pénuries, mais manquent d’une vision permettant de prévoir les évolutions à
venir du marché du travail.
Sans réelle
évolution, les pénuries de main-d’œuvre dans les métiers verts pourraient même compromettre
la transition et le développement socio-économique futur du pays.
Pour parvenir à ces
conclusions, l’étude a analysé sept secteurs économiques fortement impactés par
les politiques climatiques, à savoir les transports, la santé, l’agriculture et
l’industrie alimentaire, l’économie circulaire, la recherche et le développement,
l’enseignement et la construction.
Néanmoins, ces données
ne sont qu’indicatives car les besoins de main-d’œuvre dépendront fortement du
scénario de transition qui sera privilégié parmi les trois scénarios de
transition pour une Belgique climatiquement neutre développé par le SPF.
Une transition axée
sur l’innovation technologique ne conduira pas aux mêmes conclusions qu’une
transition intégrant la sobriété. Malheureusement, pour le moment, aucune
option claire n’a encore été prise par les Gouvernements, ce qui renforce le
problème.
Cet article ne
prétend pas être exhaustif dans la présentation des résultats de l’étude mais
voici néanmoins quelques chiffres pour illustrer les évolutions à venir dans les
principaux secteurs analysés :
Au niveau du
secteur du transport, les auteurs s’attendent à un doublement de la demande
pour les conducteurs dans les transports publics de passagers (train, tram,
bus, métro).
Une importante
augmentation des coursiers à vélo et des mécaniciens vélo est également
attendue, ce qui pose la question des conditions de travail dans les nouveaux
sous-secteurs en développement.
L’innovation dans
le secteur de la logistique pourrait également jouer un rôle important sur les
profils de main-d’œuvre sans qu’il soit possible d’avancer des chiffres.
Parallèlement, le
nombre de chauffeurs routiers est appelé à se réduire, ainsi que les
mécaniciens automobiles, sauf pour la maintenance des véhicules électriques.
Les émissions de
gaz à effet de serre dans le secteur de la santé proviennent essentiellement
des produits pharmaceutiques et du matériel médical.
Selon les auteurs,
le développement de la circularité et l’évolution vers un système de santé basé
sur la prévention seront la clé de la décarbonation du secteur.
Ces évolutions
pourraient se baser sur des changements structurels tels qu’une tarification
basée sur les résultats obtenus en termes de santé plutôt que sur le temps
passé avec chaque patient.
Une telle approche
pourrait réduire les besoins en main-d’œuvre moyennant une requalification d’un
certain nombre de travailleurs.
Cependant, compte
tenu de la pression que subissent les travailleurs du secteur, ces changements
ne seraient pas forcément négatifs car ils permettraient une amélioration des
conditions de travail.
Des pics sont
néanmoins à attendre pour faire face, par exemple, aux épisodes de vagues de
chaleur, requérant une plus grande flexibilité.
Dans l’agriculture,
l’étude avance des variations très importantes en fonction des scénarios de
transition.
Néanmoins, la
généralisation de pratiques agricoles plus écologiques pourrait conduire à une
augmentation de l’emploi de l’ordre de 35 000 à 70 000 travailleurs.
La relocalisation
de la production de fruits et légumes permettrait quant à elle de créer entre 1
100 et 28 300 emplois.
A l’inverse, la
réduction de la consommation de viande engendrerait des pertes d’emploi de
l’ordre de 4000 à 4 800.
Au niveau de
l’industrie agroalimentaire, les pertes d’emplois résultant de l’évolution des
habitudes alimentaires vers des régimes moins carnés seraient largement compensées
par d’autres créations d’emplois, notamment dans la boulangerie et la
fabrication de produits à base de farines.
En 2024, l’économie
circulaire a généré 45 000 emplois directs et 248 000 emplois indirects en
Belgique, soit 8,4 % de l’emploi total.
Le nombre d’emplois
circulaires a ainsi été multiplié par 2,66 entre 2019 et 2024 et la demande de main-d’œuvre
dans ce secteur continue à croître bien que de manière moins rapide qu’au cours
des années précédentes.
Les créations
d’emplois se concentrent au niveau du haut de l’échelle de Lansink, à savoir la
réparation et la réutilisation qui sont des activités très peu délocalisables.
La réduction de la
demande en matériaux dans l’industrie pourrait amener des pertes d’emplois
futures dans l’industrie. Dans la construction, en revanche, le développement
de l’économie circulaire ne devrait pas modifier la dynamique du secteur. Les pertes
d’emplois résultant des gains de productivité seraient compensées par la
création de nouveaux emplois tels que les « valoristes » ou les
« inventoristes ».
Les réductions
d’emplois les plus significatives devraient se produire dans les activités
liées aux énergies fossiles et à l’extraction des matières premières.
130 000 emplois
supplémentaires seront nécessaires à l’horizon 2050 pour rénover le parc
immobilier en Belgique dont 59 000 emplois directs et 79 000 emplois au niveau
de la chaîne de valeur, ceci alors que le secteur connaît déjà une pénurie de 20
000 emplois en raison principalement de la pénibilité du travail, des mauvaises
conditions d’emploi et d’un déficit de formation des travailleurs.
Or, sans réponse
aux besoins du secteur, les objectifs de rénovation énergétique seront
inaccessibles