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La directive Omnibus : un recul environnemental pour l’Europe

La directive Omnibus : un recul environnemental pour l’Europe

Le paquet législatif Omnibus, c’est le démantèlement de trois lois européennes clés sur le développement durable : la Directive sur les rapports d’entreprise sur le développement durable (CSRD), la Directive sur le devoir de diligence en matière de développement durable (CSDDD) et le Règlement de l’UE sur la taxonomie.

Publié le 08/09/2025
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Depuis la signature des accords de Paris en 2015, l’Union européenne s’est positionnée comme leader mondial de la lutte contre le changement climatique. Sous l’impulsion d’Ursula von der Leyen, le Pacte Vert (ou Green Deal en anglais) européen a été lancé en 2019 avec pour ambition de faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre d’ici 2050.

Ce pacte, présenté comme une nouvelle stratégie de « croissance durable », a été accompagné de nombreuses lois visant à encadrer les entreprises et à les orienter vers des « investissements verts ». Toutefois, suite aux élections et aux différentes influences politiques et sous la pression de certains lobbies industriels, l’Union européenne semble infléchir sa trajectoire. Le paquet législatif « Omnibus I », proposé en 2025, marque un tournant qui soulève de vives inquiétudes quant à la cohérence et à la justice sociale de la transition écologique européenne.

Objectif – 55% de GES en 2030

Avec le Green Deal, l’Europe prévoyait, entre autres, de devenir meneuse mondiale de réduction de gaz à effet de serre (GES). L’objectif principal de ce pacte était de devenir climatiquement neutre d’ici 2050, avec d’abord la réduction à 55% d’émission de GES en 2030 (par rapport à 1990).

Cette directive vise la neutralité carbone tout en assurant la transition juste et l’équité sociale. Par définition, le Green Deal nous semble aller dans la bonne direction pour éviter la catastrophe climatique.

Toutefois, le projet est aujourd’hui confronté à plusieurs dérives, notamment sur le plan social. Celles-ci risquent de compromettre ses objectifs initiaux. Nous pensons notamment à l’ETS2, une taxe « verte » imposée aux fournisseurs d’énergie qui aura des conséquences de paupérisation sur les ménages les plus précaires. Nous vous expliquions tous les détails de cette directive dans cet article : Transition et inégalités sociales : le cas de l’ETS 2 | Rise.

Dans la foulée du Green Deal

Depuis 2019, donc, l’Union européenne a adopté trois lois contraignant les grandes entreprises européennes en matière de taxonomie, de publicité en matière de durabilité, et de devoir de vigilance.

La première, appelée Taxonomie Verte et votée en 2020, est un outil identifiant les entreprises qui contribuent aux objectifs environnementaux de l’UE. Elle prévoit de distinguer les activités « vertes » des entreprises et orienter les flux financiers vers des flux durables. Plus simplement, elle prévoit de mettre la finance au service de l’économie durable et inclusive. Pour les syndicats, cette loi représente un outil pour encourager la responsabilité des entreprises et favoriser le dialogue social autour de la transition écologique.

La deuxième, appelée CSRD, votée en 2024, impose aux grandes entreprises de publier des rapports précis de durabilité. Celle-ci a comme principaux objectifs de combattre le greenwashing, de contrôler le respect des droits humains et la gouvernance des entreprises. Les délégué·e·s peuvent utiliser ces rapports comme levier pour renforcer leur rôle dans la concertation sociale et défendre les conditions de travail liées à la transition écologique.

La troisième (CSDDD), votée en 2022, contraint les grandes entreprises  à assumer la responsabilité de l’ensemble de leur chaîne de valeur (et ainsi, elles se portent responsables de leurs actions et de celles des sous-traitants de leurs sous-traitants, par exemple). Cette loi aurait permis de tenir les entreprises responsables des violations des droits humains et de les obliger à en répondre concrètement. Nous pensons à l’importance de cette loi dans l’industrie du textile, notamment. Pour les syndicats, cette loi est essentielle : elle donne un cadre pour exiger la protection des travailleur·euse·s et des communautés affectées par les activités industrielles, et ouvre des possibilités de négociation collective autour des pratiques durables.

Ce que prévoit Omnibus 1

Cette année, cependant, Ursula von der Leyen, principale figure publique associée à l’avancée de l’Europe en matière de climat depuis 2019, a décidé de faire volte-face : l’Europe a proposé une nouvelle directive (dite « Omnibus 1 ») visant à alléger les contraintes de ces lois.

Selon la présidente de la Commission Européenne, celles-ci rendent les entreprises européennes trop peu compétitives sur le marché international. Ce changement de cap semble cependant être motivé par des considérations politiques, en réponse à la montée de l’extrême droite et aux pressions exercées par certaines multinationales. Pourtant, la décarbonisation de l’industrie ne freine pas la croissance. Au contraire, elle crée de nouvelles opportunités d’emplois et de formations pour les travailleur·euse·s, ce qui représente un enjeu syndical majeur.Techniquement, l’Omnibus 1 :

  • -       Repousse les délais de reporting (CSRD) de 2026 à 2028.
  •           Repousse les délais d’application de la directive de vigilance (CSDDD) d’un an.
  • -       Modifie le nombre d’employé·e·s minimum des entreprises soumises à ces régulations. Le seuil d’employé·e·s minimum des entreprises soumises aux régulations est relevé à 1000 employé·e·s, ce qui exclut plus ou moins 80% des entreprises concernées (en passant d’environ 50 000 à un peu moins de 7000). Une majorité d’entreprises est donc exclue, réduisant ainsi l’impact des mécanismes de contrôle, ce qui affaiblit le pouvoir d’influence des syndicats dans ces entreprises.
  • -       Modifie le chiffre d’affaire minimal des entreprises soumises à ces lois (en passant de à minimum 450 millions d’euros de chiffre d’affaire).
  • -       Dans le cas du CSDDD, les entreprises ne seront finalement responsables que de leurs fournisseurs directs : il n’est plus obligatoire pour eux de contrôler le respect des droits humains aux sous-traitants de leurs fournisseurs, ni d’intervenir en cas de violation.
  • -       Les évaluations ne doivent être publiées que tous les cinq ans, à la place d’un an.
  • -       Les entreprises doivent toujours adopter un plan de transition climatique mais ne sont plus tenues de le mettre en œuvre.

Ces modifications représentent un recul non seulement pour l’environnement mais aussi pour les droits syndicaux et la capacité des travailleur·euse·s à peser sur les décisions environnementales dans leur entreprise.

De plus, toutes ces mises à jour créent le chaos au sein de certaines entreprises qui avaient déjà commencé à appliquer les lois.

La directive Omnibus illustre ainsi les tensions entre compétitivité économique et transition écologique. Pour les syndicats, il s’agit d’un signal fort : il est crucial de défendre à la fois les intérêts des travailleur·euse·s et les engagements environnementaux, en veillant à ce que la transition écologique soit réellement juste et socialement inclusive.

 

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